mercredi 25 avril 2007

Enfants des rues de Phnom Penh

Si un jour vous êtes amené à séjourner à Phnom Penh, vous serez sans doute frappés par le nombre d’enfants qui peuplent la ville. Au Cambodge, 40% de la population a moins de 15 ans. Les enfants sont partout, grouillant dans les rues, les marches… Si certains ne sont que de simples écoliers sortant ou allant à l’école, bon nombre d’entre eux cherchent surtout un moyen de gagner de l’argent pour aider leur famille. Il se peut aussi qu’ils cumulent les deux activités : école le matin et travail l’après-midi.
Ces “enfants des rues” font la manche, vendent des livres aux touristes (ils traînent leurs bouquins dans des caisses en plastiques, portées en bandoulière et deux fois plus lourdes qu’eux…), des anneaux de jasmin… En tant que touriste, il est préférable de les aider en leur offrant à boire ou à manger plutôt que de leur donner de l’argent qui pourrait être utilisé à mauvais escient.

Si vous le désirez vous pouvez passer tout votre temps avec ces enfants : parler avec eux (on est surpris par leur maîtrise de l’anglais appris auprès des touristes), leur offrir à manger, partager vos activités avec eux… Par exemple, nous avons fait des parties de billard avec deux minots pas plus haut que la table elle-même…

L’association Our Home recueille ces enfants, leur offre gîte et couverts pour une nuit, et ceux qui le veulent peuvent rester à l’orphelinat, sinon ils sont libres de repartir. Malheureusement, l’orphelinat est aujourd’hui complet, il ne peut plus accueillir de gamins.

Afin de nous permettre de mieux comprendre les situations terribles et désespérées que vivent ces enfants, Vibol, le directeur de “Our home” a voulu nous montrer les endroits où ils se terrent.

La drogue


Le premier endroit que nous avons découvert avec Vibol est un terrain vague bien caché par de hauts murs de ciment. Sur ce terrain s’étale une épaisse couche de détritus par dessus laquelle sont installées des tentes de fortune : 3 bouts de bois et un morceau de tissu. C’est à cet endroit que nous avons rencontré de jeunes garçons et une jeune femme en train de se droguer (les drogues les plus courantes sont les suivantes : methamphetamine aussi connue sous le nom de yama ou yabba, héroïne, cocaïne, speed)… Les yeux dans le vide, maigres, ils nous ont accueilli par de faibles sourires. La jeune femme portait sur la joue gauche une énorme balafre, elle nous a expliqué que de jeunes cambodgiens l’avait passée à tabac sur demande d’une autre jeune fille car elle lui avait piqué son client étranger… Vibol connaissait certains de ces jeunes gens depuis près de dix ans…



























Le cinéma et le four crématoire

Déjà un peu “bousculés”, nous sommes allés “visiter” un ghetto dans le centre de Phnom Penh. Dans un vieux cinéma s’entassent cent familles, soient six cents personnes. Pour rentrer dans ce ghetto, il faut s’enfoncer dans des ruelles, monter des escaliers plongés dans le noir puis traverser des couloirs de 30 centimètres de large dans la plus profonde pénombre, même lorsque le soleil brille à l’extérieur. Enfin, les couloirs débouchent dans un dédale de minuscules logements réalises en carton pourri essentiellement, Presque 90% de ces installations s’effondrent et sont étayées par des poteaux de fortune trouvés dans la rue. Dans chaque habitation, un lit en bois où à même le sol, quelques gamelles, un autel bouddhique. Pas d’eau, pas d’électricité (ou alors piratée sur le compteur électrique le plus proche), pas d’ouverture vers l’extérieur…
Le cinéma comprend plusieurs étages mais aucun système d’évacuation des eaux usées bien entendu… Ainsi chaque habitant d’un étage déverse déchets et excréments dans un trou et ils tombent directement SUR l’étage inférieur. Chaque niveau comprend donc un énorme tas de détritus de toute sorte, en décomposition.
Dans ce sordide endroit, on est accueilli à bras ouverts par une multitude d’enfants surexcités de voir des occidentaux dans leur habitation. Ils nous prennent dans leur bras, ne nous lâchent plus. Ils hurlent de rire à chaque photo lorsque le flash de l’appareil les éblouis. Les enfants vivant dans de tels ghetthos ne sont pas scolarisés, ils sont envoyés par leurs parents dans la rue pour travailler, mendier, voire voler et se prostituer.
Vibol a recueilli dans son orphelinat “Our Home” quelques enfants nés dans cet horrible endroit…

Bouleversés par tant de misère, on reprend notre route et on s’arrête dans un “vat” (sanctuaire bouddhiste) ou des familles se sont installées dans l’ancien four crématoire… On rencontre une dame qui nous montre sa maison : une bâche, un lit en bois, deux bancs… Vibol nous explique qu’il a recueilli au sein de l’orphelinat ses deux plus jeunes enfants (8 ans) qu’elle prostituait… Le silence et la gène s’installent…




























La décharge publique

Un autre lieu de misère est la décharge publique de Phnom Penh. Située au sud de la ville et s’étendant sur plusieurs hectares, elle est le lieu de travail de centaines de personnes, adultes comme enfants (parfois des 3 ans) qui viennent de jour comme de nuit trier les ordures pour essayer de survivre…Un kilogramme de canettes en aluminium écrasées se monnaie 2000 riels soient 40 centimes d’euros…
Les camions de ramassage des ordures se succèdent dans la décharge, déversent leur contenu et les pauvres gens se précipitent pour trier les déchets : canettes, papiers en tout genre, noyaux de mangue (pour replanter), plastique, et bien entendu nourriture… Lors de notre venue, nous avons pu observer un monsieur accroupi triant minutieusement une gamelle de riz qu’il venait de trouver… Les enfants sont extrêmement nombreux, noirs de la tête au pied, leurs petites mains plongées dans les ordures, entre seringues et déchets en décomposition. Ils nous adressent un sourire et un hello joyeux mais on est déjà trop retourné, et nos sourires sont plein de compassion et de tristesse…
Un petit garçon plein d’énergie a sauté a l’arrière du pick-up quand nous sommes repartis, son sourire nous a redonné un peu le moral…